Je n’ai compris qu’au tout dernier moment que ça n’allait vraiment pas. Une seconde plus tard, notre hélicoptère s’écrasait au sol. Une journée plus tard, je suis enfin effrayé par ce qu’il vient de m’arriver.
Comme toute histoire peu banale, tout avait bien commencé. A l’origine, un press tour pour le très attendu Flight Simulator X. Nos amis les PR de chez Microsoft n’étant jamais à court d’idées pour attirer les journalistes, la décision d’emmener tout le monde en hélicoptère à une heure de Paris était plutôt sympatoche. Rendez-vous à côté de l’Aquaboulevard vers 9h15 et zou, pas le temps de finir mon thé, nous sommes déjà en l’air.
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Très sérieusement, l’hélico est un engin extrêmement agréable et les premières minutes sont un régal. Bonne surprise, à ma gauche se trouve Stéphane Quentin de chez nVidia, mon dealer de cartes graphiques depuis 2 ans. Le bonhomme est là pour nous faire la démo en vol du jeu. Véridique. Tout aussi véridique qu’il commencera par tenter de piloter un hélicoptère comme le notre… Et n’arrêtera pas de le crasher au sol, faute de joystick, sous mes sarcasmes bien dosés. Si c’était un signe, le destin a donné un sacré coup de coude.
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C’est un peu plus tard que nous entendons un gros biiip qui s’accompagne d’une lumière rouge et surtout de bons écarts de trajectoire de notre machine. Pas de panique, le vol reprend son calme. Pourtant, quelques minutes plus tard, nous descendons assez vite sur l’aérodrôme de Lognes en Seine et Marne. Ne comprenant pas grand chose, je nous crois arrivés. Erreur.
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Le pilote tente d’atterrir dans l’herbe, puis se retrouve décalé vers le bitume. Il retente un grand virage à gauche et ce coup-ci, l’appareil part littéralement vrille. Le temps de faire deux tours et nous nous écrasons d’un coup au sol. Le seul fait d’écrire ces mots à 7h00 du mat’ me fait encore un peu trembler.
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Parce qu’au début, on faisait plutôt les cons, pour dédramatiser. Figurez-vous que malgré ce crash spectaculaire, personne n’a été blessé. Un bleu et quelques douleurs mises à part, nous somme tous ressortis indemnes de l’appareil ! Ce n’était pourtant pas gagné avec un confrère littéralement ejecté sur la gauche dès la chute de l’appareil et qui s’est retiré prestamment alors que les pales du rotor tournaient encore un peu après avoir cogné contre le bitume (nous avons atteri sur l’avant guache de l’appareil)… De notre côté, une attente du signal du pilote et nous avons tous déguerpi de la carcasse.
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Après ce genre d’évènement, généralement, c’est un peu silence assourdissant. Je n’avais pas encore compris ce qu’il s’était passé et l’hypothèse d’un petite acrobatie pour touristes ayant mal tournée me semblait raisonnable. Après le silence sont venus les rires. Pris d’une crise d’Euphorie, nous avons commencé à rire de la situation (6 mecs hagards, trempés et réfugiés dans des herbes hautes sans bouger, c’est assez étrange à voir) et nous féliciter de notre moule d’être partis en couille en phase d’atterrissage. Je me dis que je postulerais bien à une suite d’Intacto et comme des touristes, nous immortalisons le tout avec photos et vidéos pendant que les secours débarquent.
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Commence alors la longue journée post accident. Appel des pompiers, premiers constats, appel aux collègues… On ne voit pas le temps passer. Les gens de Microsoft arrivent super rapidement et nous encadrent immédiatement, même si rien n’est de leur faute. Nous allons prendre un café et le premier contre coup apparaît. Je n’arrive plus à dire un mot. La vision de ce sol qui tourbillonne et se rapproche m’obsède un peu. Je me demande comment je n’ai pu rien voir venir. Stéphane (qui pilote lui-même) et d’autres habitués de l’aérodrôme m’expliquent.
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Il faut en fait savoir qu’un hélicoptère est une machine de précision über fragile, contrairement à un avion. Tellement qu’elle suit une règle drastique : “une heure de vol = une heure d’entretien”. Notre regrettée bécane sortait pour sa part d’une grande révision.
Pour une raison encore indéterminée, l’assistance hydrolique a subitement lâché en vol. En gros, imaginez que vous conduisez votre voiture moderne et que soudainement, la direction assistée lâche. Ici, pareil sauf qu’un hélico peut partir dans plein de directions nouvelles (dont le bas) et que le vent est plutôt costaud en altitude. En gros, notre pilote a tenu à bouts de bras la machine durant de longues minutes.
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Philippe, pilote héroïque, très calme et complètement vanné. Et en plus, il a voulu payer les cafés.
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Se déroutant en urgence sur Lognes, il a tenté un atterrissage forcé et suivant c’est là que, la théorie du gruyère (que j’appelle la grosse loose) a été appliquée et que le second problème est apparu : Notre anti couple est mort. En gros, la transmission vers la dérive a laché. Pour ceux qui ne connaissent pas le rôle d’une dérive, pensez juste que sans cette petite hélice arrière, ce ne sont pas les pales qui tournent autour du cockpit, mais l’inverse. D’où notre vrille.
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A mesure que les détails arrivent, je commence à mesurer l’incroyable : entre un enchaînement historique de problèmes techniques ayant conduit à un crash et la moule divine qui nous a tous sortis de là sains et saufs, on commence à se poser des questions dont les réponses vont plus loin que la théorie du gruyère. Nous allons déjeuner. La mine déconfite de Béatrice et Marc (arrivés en urgence de la maison mère) à la vue de la carcasse et les observations judicieuses des instructeurs (“marrant, j’ai perdu tous mes potes en hélico“, “la vache, vous avez allumé un cierge ?“) me laisse sans réponse : mais comment on en est sortis indemnes ? Je vous jure que comme dans les cartoons, j’ai passé la journée, à toucher mes mains, tâter mes genoux, sentir mon torse et penser à Unbreakable. A se demander si on est vraiment vivants. Mon rédac’ chef de Technikart me le confirmera bien en mençant de me tuer si je ne rends pas mes textes (il faut dire que je viens lui claquer l’excuse de l’année)
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L’après-midi se corse avec une mini crise de narcoleptie et de longues dépositions au Bureau d’Enquêtes Aériennes (“je n’ai rien compris monsieur“) puis à Police Aérienne Française (“je me suis inquiété à environ 3 mètres sur sol“). Je regarde définitevement le ciel lorsque nous réalisons que si la panne avait eût lieu 5 secondes plus tôt, l’hélicoptère serait complètement parti sur le côté et nous nous serions sûrement écrasés la tête à pic. Dingue, c’est dingue.
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En tout cas, le retour à chez moi m’a mis un coup, j’étais justement vaporeux toute la soirée et je ne dors d’ailleurs toujours pas. Et je vous jure que pour la première fois de ma vie, j’ai eût envie de fumer une clope. Mais bon, il parait que le tabac tue.
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Et surtout un grand merci à notre pilote Philippe pour avoir décidé de sauver 5 vies le jour où nous étions dans son hélico, Microsoft (Henry, Jérôme, Béa, Marc) d’avoir été super présents (ouais, à nous la cellule de soutien psychologique demain !), ma chérie pour le traiteur italien d’accueil et mes 4 confrères pour être vivants. C’est déjà pas mal.
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