Il est étrange, ce Bruce Wayne. C’est, avec Iron Man, le seul super héros sans super pouvoirs. C’est aussi (et alors) une entité bien plus maléable et riche pour l’auteur qui le met en scène.
Je ne suis pas amateur averti de comics, mais de tous les super héros que j’ai pu suivre, Batman est de loin celui qui s’est le mieux révélé à travers les différents artistes qui l’ont fait vivre. Au cinéma, la règle est un peu différente.
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Car si Burton a frappé un grand coup avec “Batman” premier du nom, je trouve que “Batman Returns” reste le meilleur film de super héros de l’histoire. C’est aussi le film que Burton aurait le plus détesté faire.
Et puis est venu la triste triste époque de Batman 3 et 4 (Robin et Batgirl, j’en pleure encore du sang, tenez regardez), avant la renaissance “Batman Begins”, par Christopher Nolan.
Nolan qui revient avec The Dark Knight, une suite précédée d’un tsunami de buzz et de records au Box office assez dantesque. Mérité ?
Allez, la suite comme d’habitude, c’est à dire en vrac, pleine de spoils et dans la suite…
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Pour statuer du cas Ledger
Sans vouloir la jouer snobelle (contraction de snobisme rebelle), mon excitation de voir la performance de Heath Ledger s’est amenuisée à mesure que le tintouin lacrymal monté autour écrasait le reste du projet. Au point que le Joker était devenu ma principale crainte du film.
Il n’en n’est rien, le Joker est bien le héros de ce Dark Knight plus que sa bête de foire, d’une force irresistible de chaotisme. Le plan court où on le voit fuir en voiture de police, en zigzag, tête à l’air, est d’une beauté confondante.
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Pour statuer du cas Christian Bale, par la même
Bale, ah Bale : j’ai eût le malheur de le voir dans la navrante adaptation d’American Psycho, puis dans le surréaliste (de nullité) Equilibrium. Du coup, il a beau eût enchaîné des morceaux de bravoure comme le Machiniste, cette aura de cheapitude flottera toujours au-dessus de son visage monolithique.
Et cela n’est pas arrangé par la voix de cancéreux de la gorge qu’il prend une fois affublé de sa combinaison cuir intégrale…
D’un autre côté, a-t-on déjà vu un bon Bruce Wayne au cinéma ?
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Trop long, très bon
L’une des principales critiques faite au Dark Knight, c’est sa longueur. Plus que la durée, c’est le rythme, en forme de longue, très longue montée sans relâche, qui peut gêner.
Car Christopher Nolan a ainsi brisé les 5 actes classiques du blockbuster (intro, première confrontation, fourbissement des armes/plans machiavéliques, cliffhanger/tension, confrontation finale), en transformant The Dark Knight en marathon du crime à la se7en, doublé d’un bras de fer à 3. Oui, cela fait beaucoup.
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Plans à 3
Mais ces face à face à face sont la vraie réussite du film. Parce que le triangle et le triumvirat sont les structures de base, mais aussi à tiroir de Dark Knight :
– Rachel, Bruce, Harvey
– Dent, Gordon, Batman
– Batman, Joker, Mobs
– Crime, Justice, Justice illégale
La virtuosité de ces threesomes scénaristiques surgit définitivement dans la fluidité avec laquelle il se mélangent, grâce à des ingrédients comme les politiques politiciens, la police à double jeu et surtout, la population de Gotham.
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Masse critique
J’avais déjà adoré la manière dont Walle-E utilisait la masse et l’inertie des gens, au sens propre comme au sens figuré.
Chez Nolan, la manipulation des masses est plus subtile : la foule citoyenne un boulet au bout d’une chaîne que se renvoient le Joker et Batman. Manipulée, ballottée, mise face à sa lâcheté et son manque de dicernement, la société se fait encore dresser un beau portrait au vitriol.
Oui, ça sent encore le tacle anti W. Bush (il tient encore debout, hein), mais le passage des deux ferries est assez jouissif : alors les détenus jettent le détonateur par dignité (après avoir fait prouver leur lâcheté aux forces de l’ordre), les civils ne peuvent appuyer sur le bouton par simple manque de couilles. Yay !
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Action euh… Action.
Petit point faible du film, l’action n’est pas folichonne et on ne s’emporte jamais vraiment devant une séquence d’anthologie. Le parti de Nolan de faire vrai (on voit très peu d’images de synthèse) pour redonner le goût du risque aux cascades à un prix : Batman est un peu balourd, sa moto roule clairement à 35km/h (comme mon scooter hehe) etc. Sans oublier les SWAT du niveau d’un débutant de Paintball et l’enlèvement du chinois en mode Sky Hook que même Tom Cruise au pire de Mission Impossible n’aurait pas osé.
Je n’ai pas encore le recul pour imaginer une version beaucoup plus musclée et peut-être moins cohérente avec le parfum global du film.
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Pour statuer du cas Heath Ledger – bis
Ah oui, Jack Nicholson me poke sur Facebook pour rétablir la justice : le meilleur Joker, ce serait lui. En y repensant bien, je pense effectivement qu’il a produit il y a presque 20 ans un Joker absolument effrayant de démesure. Mais les deux versions du rival de Batman sont brillants, car à l’image de l’univers de Burton puis Nolan. Rococco gothique pour le premier, Crado Humain pour le second. Et les Joker qui ont habité ces films les ont rendu vivant à tous les égards, en vampirisant totalement l’attention, et le poids de leur rival, le Batman.
Moi je dis match nul. Enfin brillant, mais nul. Bref.
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Eternels seconds
On pourrait en parler pour rappeler les autres acteurs qui la jouent sobre. Michael Cain hausse son sourcil d’anglais noble, Morgan Freeman sourit toujours comme le vieil érudit qui a tout compris ce que vous comprendrez “plus tard” (dans 20 ans), Maggie Gyllenhaal a du style sans être trop excitante, Aaron Eckhart ressemble toujours au fils de Manimal et Gary Oldman est toujours à l’étroit dans les rôles de gentils (Leon, anyone ?)
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Gotham
Petit point update en lisant vos commentaires : c’est vrai que Gotham City s’est complètement faite effacer. On passe d’un chef d’oeuvre d’architecture en ombre et lumières, gothique et rétro, tout en lignes tendues et en arches à… New York. Ou Chicago. Ou Metropolis.
Je me demande si Nolan était obsédé par la crédibilité au point de rationnaliser les théâtres de opérations. Du coup, même le passage de Hong Kong semble tout droit sorti d’un Mission Impossible.
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The Dark Knight
Ils sont rares, les titres qui vous mettent un coup au coeur lorsque vous les comprenez à la toute fin. The Dark Knight en fait partie.
The Dark Knight est marquant car loin de ce que l’on en attend : froid, logique, patient jamais hors de ses gonds. Il n’en reste pas moins impressionnant de maîtrise. Tant de trajectoires, une telle durée et au final, une telle consistance, je dis chapeau.
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Et désolé pour le manque de liens et la trombe de barbarismes et anglicismes, j’étais nerveux, j’ai rendez-vous ce soir et il fallait que j’écrive pour me détendre, sinon c’était les ongles qui y passaient. Oui, moi aussi j’ai mes côté sombres.
Have you ever danced with the Devil by a pale moonlight ?
Dans la salle, il y avait aussi :
VuQuan
Sasha la pin up
Osmany
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